LES ÉTAPES DE PROGRESSION ET DE COMPRÉHENSIONS
DE LA MÉDITATION VIPASSANA
par le Mahasi Sayadaw

white Buddha statue on body of water
white Buddha statue on body of water

LES ÉTAPES DE PROGRESSION ET DE COMPRÉHENSIONS DE LA MÉDITATION VIPASSANA

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Vénérable Mahasi Sayadaw
Traduction Vipassanasangha

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Table des matières

 

• Introduction

 

• I. Purification de la conduite (sila-visuddhi)

 

• Méthode de la connaissance intuitive (en bref)

 

• II. Purification de l'esprit (citta-visuddhi)

 

• III. Purification de la vue (ditthi-visuddhi)

 

• 1. Connaissance analytique du corps et de l'esprit (nama-rupa-pariccheda-ñana)

 

• IV. Purification en surmontant le doute (kankha-vitarana-visuddhi)

 

• 2. Connaissance en discernant la conditionnalité (paccaya-pariggaha-ñana)

 

• 3. Connaissance par compréhension (sammasana-ñana)

 

• 4. Connaissance de l'apparition et de la disparition (udayabbaya-ñana) dans sa phase initiale, impliquant les dix corruptions de la connaissance intuitive

 

• V. Purification par la connaissance et la vision de ce qu’est la voie et non la voie (maggamagga-ñanadassana-visuddhi)

 

• VI. Purification par la connaissance et la vision du cours de la pratique (patipada-ñanadassana-visuddhi) (y compris la connaissance complète de l'apparition et de la disparition)

 

• 5. Connaissance de la dissolution (bhanga-ñana)

 

• 6. Connaissance de la peur (bhayatupatthana-ñana)

 

• 7. Connaissance de l’aspect insatisfaisant de toute mchose (adinava-ñana)

 

• 8. Connaissance du dégoût (nibbida-ñana)

 

• 9. Connaissance du désir de délivrance (muncitu-kamyata-ñana)

 

• 10. Connaissance de la ré-observation (patisankhanupassana-ñana)

 

• 11. Connaissance de l'équanimité (sankharupekkha-ñana)

 

• 12. Connaissance intuitive conduisant à l'émergence (vutthanagamini-vipassana-ñana)

 

• 13. Connaissance de l'adaptation (anuloma-ñana)

 

• 14. Connaissance de la maturité (gotrabhu-ñana)

 

• VII. Purification par la connaissance et la vision (ñanadassana-visuddhi)

 

• 15. Connaissance de la voie (magga-ñana)

 

• 16. Connaissance de la réalisation (phala-ñana)

 

• 17. Connaissance de la révision (paccavekkhana-ñana)

 

• 18. Obtention de la réalisation (phalasamapatti)

 

• 19. Les voies supérieures et les réalisations

 

• Conclusion

 

 

 

Introduction

 

Ce texte explique les progrès de la connaissance intuitive, ainsi que les étapes de purification correspondantes. Il a été écrit brièvement pour aider les méditants qui ont obtenu des résultats élevés dans leur pratique, afin qu'ils puissent plus facilement comprendre leur expérience, et également pour ceux qui sont parvenus à réaliser le Dhamma.

 

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I. Purification de la conduite

 

 

La purification de la conduite signifie ici, dans le cas des méditants laïques, l'acceptation des préceptes et leur observance, que ce soit les cinq, les huit ou les dix préceptes, et pour les moines, l’observance parfaite des règles disciplinaires monastiques, appelées Patimokkha.

 

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• Méthode de la connaissance intuitive (en bref)

 

Lorsque la purification de la conduite a été établie, le méditant qui a choisi la connaissance intuitive pure comme méthode doit s'efforcer de contempler le corps et l'esprit (nama-rupa). Ce faisant, il devrait contempler, selon leurs caractéristiques, les cinq groupes de saisie (les cinq agrégats), c'est-à-dire les processus corporels et mentaux qui deviennent évidents pour lui aux portes des six sens.

 

La connaissance intuitive doit, en effet, être développée en notant, selon leurs caractéristiques spécifiques et générales, les processus corporels et mentaux qui se manifestent aux portes des six sens.

 

Au début, cependant, il est difficile de suivre et de noter clairement tous les processus corporels et mentaux qui apparaissent sans cesse aux portes des six sens. Par conséquent, le méditant débutant doit d'abord noter le processus parfaitement distinct du toucher, perçu à travers la porte de la sensibilité corporelle.

 

En position assise, le processus corporel du toucher se produit par la posture assise et par la sensibilité au toucher dans le corps. Ces processus de sensibilité tactile doivent être notés comme « assis, toucher », et cela continuellement.

 

De plus, au niveau de l'abdomen, le processus tactile du mouvement corporel (c'est-à-dire l’air, ou élément vibratoire) qui possède la respiration comme condition, est perceptible en permanence lors de la montée (expansion) et la descente (contraction) de l'abdomen. Cela aussi doit être noté comme « lever, baisser ».

 

Tandis que le méditant note le mouvement qui se manifeste continuellement au niveau de la sensibilité corporelle dans l'abdomen, il voit clairement les aspects de tension, de vibration, de poussée et de traction. Ici, l'aspect de tension montre la nature de l'élément de mouvement, l'aspect de vibration montre sa fonction essentielle de mouvement, et l'aspect de poussée et de traction montre sa manifestation d'impulsion.

 

Par conséquent, le méditant, remarquant le processus corporel tactile de montée et de descente de l'abdomen, accomplit l'observation du processus corporel (rupa), en apprenant à connaître les caractéristiques de l'élément de mouvement. Plus tard, lorsqu'il aura réalisé l'observation de l'esprit (nama) et l'observation à la fois du corps et de l'esprit (nama-rupa), il en viendra également à connaître les caractéristiques générales des processus concernés : leur impermanence, leur aspect de souffrance et leur existence vide de soi.

 

Pendant que le méditant note le soulèvement et l'abaissement de l'abdomen, des pensées, des sensations ou autres apparaissent. Tout ce qui naît dans l'esprit et dans le corps doit également être noté. Après avoir noté ces sensations ou pensées, il doit observer à nouveau la montée et la descente de l'abdomen, qui est l'objet de base de la pleine conscience dans la pratique Vipassana.

 

Ceci est un bref aperçu de la pratique de la connaissance intuitive Vipassana, car il s'agit d'un bref essai sur les progrès de la connaissance intuitive à travers les étapes de la purification, ce n'est pas un traité expliquant en détail la pratique de la connaissance intuitive Vipassana.

 

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II. Purification de l'esprit

 

Pendant la première partie de la pratique Vipassana, tant que l'esprit du méditant n'est pas encore complètement purifié, des pensées vagabondes apparaîtront par intermittence. Parfois, le méditant débutant percevra ces interruptions et parfois non. Mais même s'il les perçoit, ce ne sera qu'après un certain laps de temps après leur apparition parce que la concentration momentanée de son esprit est encore très faible. Ainsi, ces pensées vagabondes continueront d'entraver son esprit pendant qu'il développe la pratique de l'observation. Par conséquent, ces pensées vagabondes sont appelées "pensées gênantes".

 

Lorsque la concentration momentanée de son esprit est devenue forte, le méditant est bien concentré. Par conséquent, lorsqu'il note des objets comme le mouvement abdominal, s'asseoir, toucher, se pencher, s'étirer, voir, entendre, etc… ses notes mentales apparaissent maintenant comme si elles touchaient ces objets, comme si elles les percutaient. Et en règle générale, son esprit ne vagabondera plus ailleurs. Ce n'est qu'occasionnellement, et dans une faible mesure, que cela se produira, et même dans ces cas-là, le méditant sera capable de noter ces pensées vagabondes dès leur apparition, c’est-à-dire immédiatement après leur apparition réelle. Alors ces pensées vagabondes s'estomperont dès qu'elles seront notées et ne se reproduiront plus. Immédiatement après, le méditant sera également capable de reprendre l'observation continue de n'importe quel objet dès qu'il deviendra évident et prédominant pour lui. C'est pourquoi son esprit à ce moment-là est appelé "sans entrave".

 

Tandis que le méditant pratique ainsi l'exercice de noter avec un esprit sans entrave, l'esprit qui note se focalisera et se fixera sur n'importe quel objet noté, et l'acte de noter se poursuivra sans interruption. À ce moment apparaît en lui en succession ininterrompue « la concentration de l'esprit qui dure un instant », dirigée vers chaque objet noté. C'est ce qu'on appelle la purification de l'esprit.

 

Bien que cette concentration n'ait qu'une durée momentanée, son pouvoir de résistance à être submergé par des pensées vagabondes correspond à celui de la concentration d'accès.

 

Dans le Commentaire du Visuddhimagga, dans l'explication du chapitre relatif à l'attention à la respiration, il est dit : « l’unification momentanée de l'esprit » signifie la concentration de l'esprit qui ne dure qu'un instant.

 

Quand ce type de concentration se produit sans interruption avec une continuité ininterrompue de notes mentales notant immédiatement les objets d’observation les uns après les autres, la concentration permet l’observation de tous les objets avec la même intensité, c’est-à-dire le même degré de concentration. La concentration momentanée dans son flux ininterrompu n'est alors pas submergée par les entraves mentales.

 

La force de la concentration momentanée est similaire à celle de la concentration qui a atteint la pleine absorption mentale. Cependant, une telle similarité entre concentration momentanée et concentration pleinement absorbée ne deviendra évidente que lorsque la pratique de la connaissance intuitive Vipassana atteindra son point culminant.

 

Mais n'est-il pas dit dans les commentaires que le terme « purification de l'esprit » ne s'applique qu'à la concentration d'accès et à la concentration pleinement absorbée ? C'est vrai, mais il faut prendre cette affirmation dans le sens où la concentration momentanée est incluse dans la concentration d'accès. Car dans le commentaire du Satipatthana Sutta, il est dit : "Les douze exercices restants sont des sujets de méditation menant uniquement à la concentration d'accès".

 

Dans le cas des sujets traités dans les sections du Satipatthana Sutta sur les postures, compréhensions et éléments, la concentration de celui qui s'adonne à ces exercices ne sera certainement qu'une concentration momentanée. Mais comme cette dernière est capable de supprimer les entraves, tout comme le fait la concentration d'accès, et puisqu'elle est voisine de la concentration d'atteinte de la voie noble, donc cette même concentration momentanée est désignée par le nom "d’accès" (ou " voisinage") et les sujets de méditation qui produisent cette concentration momentanée sont aussi appelés "sujets de méditation menant à la concentration d'accès".

 

Par conséquent, il faut comprendre que la concentration momentanée, ayant la capacité de supprimer les obstacles, a également droit au nom "d’accès" et de "purification de l'esprit". Sinon, la purification de l'esprit ne pourrait pas se produire chez celui qui a fait de la connaissance intuitive pure sa méthode, en n'employant que la connaissance intuitive, sans avoir produit soit la concentration d'accès, soit la concentration pleinement absorbée.

 

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III. Purification de la vue

 

1. Connaissance analytique du corps et de l'esprit

 

Doté de la purification de l'esprit et continuant la pratique de l'observation, le méditant en vient maintenant à connaître le corps et l'esprit de manière analytique comme suit : « La montée (mouvement vers le haut) de l'abdomen est un processus, la descente (mouvement vers le bas) en est un autre, s'asseoir en est un autre, toucher en est un autre », etc... De cette façon, il apprend à distinguer chaque processus corporel qu'il note. De plus, il réalise : « La connaissance du mouvement ascendant est un processus, la connaissance du mouvement descendant en est un autre. De cette façon, il apprend à connaître chaque acte mental de noter.

 

De plus, le méditant se rend compte que : « Le mouvement ascendant est un processus, sa connaissance en est un autre. Le mouvement descendant est un processus, sa connaissance en est un autre », etc... De cette façon, le méditant apprend à distinguer chaque processus corporel et mental. Toute cette connaissance vient du simple fait de noter, non du raisonnement, c'est-à-dire qu'il s'agit d'une connaissance par expérience directe obtenue par le simple fait de noter, et non d'une connaissance dérivée d'un raisonnement.

 

Ainsi, lorsqu'il voit un objet visuel avec l'œil, le méditant sait distinguer chaque facteur impliqué : « L'œil est un, l'objet visuel est un autre, voir est un autre et le savoir en est un autre ». Cela s'applique aussi dans le cas des autres organes des sens.

 

À ce moment-là, dans chaque acte de noter, le méditant connaît analytiquement les processus mentaux de noter, et ceux de penser et de réfléchir, les connaissant par lui-même à travers une connaissance directe par sa propre expérience. Ainsi, il sait : « les processus mentaux de noter ont la nature d'aller vers un objet, se diriger vers un objet, connaître un objet ».

 

D'autre part, il connaît analytiquement les processus matériels qui se déroulent dans tout le corps, qui sont ici décrits comme : les mouvements de montée et de descente de l'abdomen, l'assise, etc… Ainsi le méditant sait qu’ils n'ont pas la nature d'aller vers un objet, ou de connaître un objet. Une telle connaissance est appelée "connaître la matière (ou le corps) par sa manifestation de non-détermination". Car il est dit dans le Mula-Tika, le sous-commentaire principal de l'Abhidhamma vibhanga : "En d'autres termes, 'non-déterminant' (comme dans le passage cité) doit être compris comme n'ayant aucune faculté de connaître un objet."

 

Une telle connaissance, qui analyse dans chaque acte d'observation à la fois le processus corporel observé et le processus mental engagé dans l'observation, selon leur véritable nature essentielle, est appelée « connaissance analytique du corps et de l'esprit ».

 

Lorsque cette connaissance est parvenue à maturité, le méditant comprend : « Au moment de l'inspiration, il y a seulement le mouvement ascendant de l'abdomen et la connaissance du mouvement, mais il n'y a pas de « moi » en plus, au moment de l'expiration, il n'y a que le mouvement de descente de l'abdomen et la connaissance du mouvement, mais il n'y a pas de « soi » en plus ». Le méditant connaît et voit par lui-même : « Il n'y a ici qu’un processus matériel comme objet et un processus mental qui connaît l’objet, et c'est seulement à ce double processus que font référence les termes d'usages conventionnels : « être », « personne » ou « âme », « moi » ou « un autre », « homme » ou « femme ». Mais en dehors de ce double processus, il n'y a pas de personne ou d'être séparé, moi ou un autre, homme ou femme ».

 

C'est ce qu'on appelle la purification de la vue.

 

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IV. Purification en surmontant le doute

 

2. Connaissance en discernant la conditionnalité

 

Lorsque la purification de la vue est parvenue à maturité, les conditions nécessaires aux processus corporels et mentaux observés deviendront également évidentes. Le moment de conscience qu’est l’intention, qui est la condition d’apparition du processus corporel respectif sera évidente : par exemple, en pliant les bras ou les jambes, l'intention de plier les membres est évidente. Ainsi, le méditant note d'abord ce moment de conscience qu’est l’intention, et ensuite il note l'acte de plier, et ainsi de suite. Alors il comprend par expérience directe : « Lorsqu'il y a l’intention de plier un membre, le processus corporel de flexion apparaît, quand il y a l'intention d'étirer un membre, le processus corporel d'étirement apparaît ». Et de la même manière, il comprend aussi d'autres cas par expérience directe.

 

Encore une fois, il comprend aussi par expérience directe la condition du processus mental : « Dans le cas d'une pensée vagabonde, apparaît d'abord la conscience correspondante accordant une attention initiale à l'objet distrayant. Si cette pensée qui apparaît n'est pas notée avec l'attention, alors surgit la pensée qui vagabonde. Mais si la conscience de l'attention initiale à l'objet distrayant est notée et connue, aucune pensée parasite ne surgit.

 

Cela est identique dans le cas des autres types de conscience d’états mentaux, par exemple lorsque l'on se réjouit ou que l'on est en colère, avide, etc… Lorsque la porte sensorielle de l'œil et un objet visuel sont présents, la conscience visuelle apparaît, sinon la conscience visuelle ne se produit pas, et il en est aussi de même pour les autres portes sensorielles. S'il y a un objet perceptible ou reconnaissable, alors surgit une conscience engagée dans l'observation ou la pensée ou le raisonnement ou la compréhension, selon le cas. Sinon aucune conscience de ce genre n'émerge. De même, le méditant comprend ce qui se passe dans tous les autres cas de la cognition de l'esprit.

 

À ce moment-là, le méditant ressent généralement différentes nombreuses sensations douloureuses survenant dans le corps. Pendant qu'une de ces sensations est notée sans attachement, une autre sensation surgit ailleurs, et pendant qu'il s'en aperçoit, encore une autre apparaît ailleurs. Ainsi, le méditant suit chaque sensation au fur et à mesure qu'elle surgit et la note. Mais bien qu'il note ces sensations au fur et à mesure qu'elles surviennent, il ne perçoit que leur phase initiale d'« apparition » et non leur phase finale de « dissolution ».

 

De plus, de nombreuses diverses images mentales apparaissent alors : une pagode, un moine, un homme, une maison, un arbre, un parc, un manoir céleste, un nuage, etc... Ici aussi, tandis que le méditant note l'une de ces images mentales, une autre apparaît. Suivant ainsi les images mentales au fur et à mesure qu'elles surgissent, le méditant continue à les noter. Mais bien qu'il les note, il ne perçoit que leur phase initiale, et non leur phase finale.

 

Le méditant comprend : « La conscience surgit conformément à chaque objet qui devient évident. S'il y a un objet, la conscience surgit, s'il n'y a pas d'objet, aucune conscience ne surgit. »

 

Entre les séquences d'observation, il comprend : « C'est en raison de la présence de causes et de conditions telles que l'ignorance, l'avidité, le kamma, etc… que le corps et l'esprit continuent ».

 

Un tel discernement par expérience directe, lorsque l'on note le corps et l'esprit avec leurs conditions, est appelé « la connaissance de la conditionnalité discernante ». Lorsque cette connaissance est parvenue à maturité, le méditant ne perçoit que les processus corporels et mentaux se produisant en stricte conformité avec leurs conditions particulières et appropriées et il en arrive à la conclusion : « Voici seulement un processus conditionnant corps/esprit et un processus conditionné corps/esprit. En dehors de ceux-ci, il n'y a personne qui effectue la flexion des membres ou qui éprouve des sensations de douleur, etc...

 

C'est ce qu'on appelle la purification (de la connaissance intuitive) en surmontant le doute.

 

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3. Connaissance par compréhension

 

Lorsque cette « purification de la connaissance intuitive en surmontant le doute » a atteint sa maturité, le méditant discernera distinctement les phases initiale, intermédiaire et finale de tout objet qu'il notera. Dans le cas de divers objets notés, il discernera alors distinctement que ce n'est qu'après la fin de chaque processus antérieur que surgit un processus ultérieur. Par exemple, ce n'est que lorsque le mouvement ascendant de l'abdomen est terminé que survient le mouvement descendant, ce n'est que lorsque le mouvement descendant est terminé qu'il y a à nouveau un mouvement ascendant. Il en est de même pour la marche : c'est seulement lorsque le soulèvement du pied est terminé que survient le déplacement du pied vers l'avant, ce n'est que lorsque le déplacement du pied vers l'avant est terminé que s'ensuit la pose du pied sur le sol.

 

Dans le cas de sensations douloureuses, ce n'est qu'après qu’une sensation se produisant à un endroit cesse, qu'une nouvelle sensation apparaît à un autre endroit. En notant la sensation douloureuse deux, trois fois ou plus, le méditant verra qu'elle diminue graduellement et finalement cesse complètement.

 

Dans le cas des diverses images qui entrent dans le champ de l'esprit, ce n'est qu'après que chaque image notée ait disparu, qu'un nouvel objet entre dans le champ de l'esprit. En les remarquant attentivement deux, trois fois ou plus, le méditant verra que ces objets mentaux qui sont notés se déplacent d'un endroit à un autre, ou qu'ils deviennent graduellement plus petits et moins distincts, jusqu'à ce que finalement ils disparaissent complètement. Le méditant ne perçoit rien qui soit permanent et durable, ou exempt de destruction et de disparition.

 

Voyant comment chaque objet, même pendant qu'il est noté, arrive à la destruction et à la disparition, le méditant le comprend comme impermanent dans le sens de subir la destruction. Il le comprend en outre comme une souffrance (douloureuse) dans le sens d'une rupture après chaque surgissement. Ayant vu comment diverses sensations douloureuses surgissent en succession continue : comment si une sensation douloureuse cesse, une autre surgit, et quand celle-ci a cessé, une autre surgit à nouveau, ayant vu cela, le méditant comprend les objets respectifs comme un simple conglomérat de souffrance. De plus, il comprend l'objet comme consistant en de simples phénomènes impersonnels, sans maître, qui ne surviennent pas d'eux-mêmes ou par eux-mêmes, mais surviennent sous réserve de conditions, puis disparaissent.

 

Cette compréhension d'un objet perçu, comme étant impermanent, douloureux, et sans soi (impersonnel), par la connaissance de sa nature d'impermanence, etc…, au moyen d'un simple constat, sans réfléchir ni raisonner, s'appelle « la connaissance par la compréhension par l’expérience ».

 

Ayant ainsi vu les trois caractéristiques une ou plusieurs fois par expérience directe, le méditant, par inférence à partir de l'expérience directe de ces objets notés, comprend tous les processus corporels et mentaux du passé, du présent et du futur, et du monde entier, et en vient à la conclusion : « Eux aussi sont de la même manière impermanents, douloureux et sans soi. » C'est ce qu'on appelle « la connaissance de la compréhension par inférence ».

 

Faisant allusion à cette connaissance même, il est dit dans le Patisambhidamagga : « Tout ce qu'il y a de matérialité, passée, présente ou future, interne ou externe, grossière ou fine, inférieure ou supérieure, lointaine ou proche, toute matérialité qu'il définit comme impermanente est une compréhension ».

 

Aussi dans le commentaire du Kathavatthu il est dit : « Même si l'impermanence d'une seule formation (phénomène conditionné) est connue, il peut y avoir compréhension du reste par induction, ainsi : « Toutes les formations sont impermanentes ».

 

Les mots « Toutes les formations sont impermanentes » renvoient à une compréhension par induction, et non à une compréhension par perception d'un objet co-présent au même instant. (Ce passage est l'autorité pour l'utilisation du terme « intuition inductive ».)

 

Toujours dans le commentaire du Majjhima Nikaya, il est dit : « Parce que dans le cas du domaine de ni-perception-ni-non-perception, la connaissance intuitive dans la séquence des facteurs mentaux appartient seulement aux bouddhas et non aux disciples. Le Bouddha a dit cela indiquant ainsi la « connaissance intuitive par groupes ». (Ce passage est l'autorité pour l'utilisation du terme « compréhension par groupes ».

 

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4. Connaissance de l'apparition et de la disparition :

 

Les dix corruptions de la connaissance intuitive

 

Lorsque le méditant, dans l'exercice de l'observation, est capable de s'en tenir exclusivement au processus actuel du corps et de l'esprit, sans regarder vers les processus passés ou les processus futurs, alors, à la suite de la connaissance intuitive, la vision mentale d’une lumière brillante apparaîtra. Pour certains méditants, cela apparaîtra comme la lumière d'une lampe, pour d'autres comme un éclair, ou comme l'éclat de la lune ou du soleil... Pour certains, cela peut ne durer qu'un instant, pour d'autres, cela peut durer plus longtemps.

 

Il s'élèvera également en lui une forte attention relative à la connaissance intuitive. En conséquence, toutes les apparitions successives des processus corporels et mentaux se présenteront à la conscience occupée à noter, comme si elles y venaient d'elles-mêmes, et la pleine conscience semblera aussi se poser sur les processus d'elle-même. Par conséquent, le méditant sait alors : « Il n'y a pas de processus corps-esprit dans lequel la pleine conscience ne parvient pas à s'engager ».

 

Sa connaissance consistant en la connaissance intuitive, appelée ici « noter », sera également aiguë, forte et lucide. Par conséquent, il discernera clairement et sous des formes séparées tous les processus corporels et mentaux observés, comme s'il coupait en morceaux une pousse de bambou avec un couteau bien aiguisé. Par conséquent, le méditant sait alors : "Il n'y a pas de processus corporel et mental qui ne puisse être noté." Lorsqu'il examine les caractéristiques de l'impermanence, etc… ou d'autres aspects de la réalité, il comprend tout très clairement et immédiatement, et il sait que c'est la connaissance dérivée de l'expérience directe.

 

De plus, une foi solide concernant la connaissance intuitive s'élève en lui. Sous son influence, l'esprit du méditant engagé dans l'observation ou la note mentale est serein et sans aucune perturbation, et il se remémore facilement les vertus du Bouddha, du Dhamma et de la Sangha. Surgissent en lui le désir de proclamer l'Enseignement du Bouddha, une confiance joyeuse dans les vertus de ceux qui sont engagés dans la méditation, le désir de conseiller à des amis et parents de pratiquer la méditation, la reconnaissance de l'aide reçue de son maître de méditation, son mentor spirituel, etc… Ces processus mentaux et bien d'autres similaires se produiront.

 

Apparaît également un ravissement, une joie profonde dans ses cinq degrés, en commençant par une joie mineure. Lorsque la purification de l'esprit est acquise, cette joie profonde commence à apparaître en provoquant la sensation de « chair de poule », des tremblements dans les membres, etc..., puis elle produit une sublime sensation de bonheur et d'exaltation, remplissant tout le corps d'un frisson extrêmement doux et subtil. Sous son influence, le méditant a l'impression que son corps se soulève et reste en l’air sans toucher le sol, ou comme s'il était assis sur un coussin d'air, ou comme s'il flottait dans l’air.

 

Puis, apparaît la tranquillité d'esprit avec la caractéristique d'apaiser les perturbations de la conscience et ses concomitants mentaux, et avec elle apparaît l'agilité mentale. Lorsqu'il marche, se tient debout, s'assied ou s'allonge, il n'y a, sous l'influence de ces qualités mentales, aucune perturbation de la conscience et de ses concomitants mentaux, ni lourdeur, ni rigidité, ni inconfort... Au contraire, sa conscience et ses concomitants mentaux sont tranquilles parce qu'ils ont atteint le soulagement suprême dans l'inaction.

 

Ils sont agiles en fonctionnant toujours rapidement, ils sont dociles et peuvent s'occuper de n'importe quel objet désiré, ils sont maniables, en étant capables de s'occuper d'un objet pendant n'importe quelle durée désirée, ils sont tout à fait lucides par leur compétence, c'est-à-dire par la facilité avec laquelle la connaissance intuitive pénètre l'objet, ils sont aussi directement dirigés et tournés uniquement vers des activités saines.

 

Là aussi surgit une sensation de bonheur sublime qui irrigue tout le corps du méditant. Sous son influence, il devient extrêmement joyeux et il pense : "Maintenant, je serai toujours heureux", ou "Maintenant, j'ai trouvé un bonheur jamais ressenti auparavant", et il veut raconter son expérience extraordinaire aux autres. En référence à ce ravissement et à ce bonheur, qui sont soutenus par les facteurs de tranquillité, etc… il a été dit :

 

Le surhumain est le bonheur d'un moine

Qui, l'esprit tranquille,

Dans un endroit isolé,

Gagne un aperçu du Dhamma.

Quand il comprend parfaitement

L'ascension et la chute des cinq groupes,

Il gagne le ravissement, la joie,

Et l'Immortel, pour ceux qui comprennent.

(Dhammapada vv. 373-374)

 

A ce stade, une énergie s'élève, qui n'est ni trop faible ni trop forte, mais qui est vigoureuse et agit uniformément. Car jadis son énergie était parfois faible, et ainsi le méditant était accablé par la paresse et la torpeur, par conséquent, il ne pouvait pas noter avec vivacité ni continuellement les objets au fur et à mesure qu'ils devenaient évidents, et sa compréhension n'était pas claire non plus. Et à d'autres moments, son énergie était trop forte, et le méditant était dominé par l'agitation, avec le même résultat d'être incapable de noter clairement. Mais maintenant son énergie n'est ni trop faible ni trop forte, elle est vigoureuse et agit uniformément, et surmontant la paresse, la torpeur et l'agitation, le méditant est capable de noter les objets présents de manière aiguë et continue, et sa compréhension est également très claire.

 

Apparaît également en lui une grande équanimité associée à la connaissance intuitive, qui est neutre envers toutes les formations. Sous son influence, le méditant considère avec neutralité son examen de la nature de ces formations, en ce qui concerne leur caractère impermanent, etc... et il est capable de noter rapidement et continuellement les processus corporels et mentaux qui surviennent à ce moment-là.

Il note à présent sans effort.

 

Puis, s'élève un attachement subtil au calme profond lié à la joie procurée par la connaissance intuitive. Cependant, le méditant, n'est pas capable de discerner cela comme une corruption, mais il croit qu'il s'agit simplement de la félicité de la méditation. Les méditants en font l'éloge comme suit : "Ce n'est que maintenant que je trouve le grand plaisir dans la méditation !"

 

Ayant ressenti un tel ravissement et bonheur accompagnés par la "lumière brillante" et appréciant de noter parfaitement, avec aisance et rapidité, le méditant croit maintenant : "Je dois avoir atteint très certainement le chemin supramondain et la réalisation ! Maintenant, j'ai terminé ma tâche de la méditation." C'est confondre ce qui n'est pas le chemin avec le chemin, et c'est une corruption de la connaissance intuitive qui se produit généralement de la manière décrite ci-dessus. Mais même si le méditant ne prend pas la "lumière brillante" et les autres corruptions comme une indication du chemin et de la réalisation, il en ressent toujours du plaisir. C'est également une corruption de la connaissance intuitive. Par conséquent, la connaissance consistant à noter, même si elle fonctionne rapidement, est appelée "le stade précoce de la connaissance (ou "faible") de l'apparition et de la disparition", si elle est assaillie et corrompue par ces corruptions. Pour la même raison, le méditant n'est pas à ce moment en mesure de discerner très distinctement l'apparition et la disparition des processus corporels et mentaux.

 

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V. Purification par la connaissance et la vision de ce qui est le chemin et le non-chemin

 

Alors qu'il est engagé dans l'observation, le méditant, soit par lui-même, soit par les instructions de quelqu'un d'autre, en vient à cette conclusion : « La lumière brillante, et les autres choses que j'expérimente, ne sont pas le chemin. S'en réjouir n'est qu'une corruption de la connaissance intuitive. La pratique consistant à noter continuellement l'objet au fur et à mesure qu'il devient évident est la seule voie de la connaissance intuitive. Je dois continuer de noter. » Cette conclusion est appelée purification par la connaissance et la vision de ce qui est le chemin et le non-chemin.

 

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VI. Purification par la connaissance et la vision du cours de la pratique

 

Après avoir noté ces manifestations de lumière brillante et les autres, ou après les avoir ignorées, le méditant continue constamment comme avant de noter les processus corporels et mentaux à mesure qu'ils deviennent évidents aux six portes des sens. Pendant qu'il est ainsi engagé dans l'observation, il surmonte les corruptions relatives à la lumière brillante, au ravissement, à la tranquillité, au bonheur, à l'attachement, etc... et sa pratique reste exclusivement centrée sur l'apparition et la disparition des processus notés. A chaque acte d'observation, il voit à présent : « L'objet noté, ayant surgi, disparaît instantanément. » Il devient également clair pour lui que chaque objet disparaît là où il surgit, il ne passe pas à un autre endroit.

 

De cette façon, il comprend par expérience directe comment les processus corporels et mentaux surgissent et disparaissent d'instant en instant. C'est une profonde connaissance et compréhension résultant de la perception continue des processus corporels et mentaux à mesure qu'ils apparaissent et se dissolvent à chaque instant, et du discernement de l'apparition et de la disparition de chacun d'eux, tout en étant libre des corruptions.

 

C'est ce que l'on appelle "la connaissance finale de la contemplation de l'apparition et de la disparition". C'est le début de « l'épuration par la connaissance et la vision du déroulement de la pratique » qui part de cette connaissance intuitive et s'étend jusqu'aux connaissances d'adaptation.

 

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5. Connaissance de la dissolution

 

Remarquant les processus corporels et mentaux au fur et à mesure qu'ils surviennent, le méditant les voit partie par partie, segment par segment, fraction par fraction : « Juste à cet instant ça surgit, juste à cet instant ça se dissout. » Lorsque cette connaissance de l'apparition et de la disparition deviendra mature, pénétrante et forte, elle surgira facilement et progressera sans interruption comme si elle s’amplifiait d’elle-même. De même, les processus corporels et mentaux seront aussi facilement discernables. Lorsque la connaissance approfondie se poursuit ainsi et que les formations sont facilement discernables, alors ni l'apparition de chaque processus corporel et mental, ni sa phase médiane appelée « présence », ni la continuité des processus corporels et mentaux appelée « occurrence en tant que flux ininterrompu » n'est apparente au méditant : ni la forme de la main, du pied, du visage, du corps, etc... ne lui est apparente. Mais ce qui lui est apparent n'est que l'arrêt des processus corporels et mentaux, appelés "disparition", ou " extinction", ou "dissolution".

 

Par exemple, en remarquant le mouvement ascendant de l'abdomen, ni sa phase initiale ni sa phase médiane ne sont apparentes, mais seule la cessation ou la disparition, qui est appelée la phase finale, est apparente, et il en est de même du mouvement descendant de l'abdomen. Encore une fois, dans le cas de la flexion d'un bras ou d'une jambe, tout en remarquant l'acte de flexion, ni la phase initiale ni la phase médiane de la flexion n'est apparente, ni la forme du membre n'est apparente, mais seule la phase finale de cessation et de disparition est apparente. Il en est de même dans les autres cas d'étirement d'un membre, etc…

 

À ce moment-là chaque objet noté lui semble être totalement absent ou devenu inexistant. Par conséquent, à ce stade de la connaissance, il lui semble qu'il était en train de noter quelque chose qui est déjà devenu absent ou inexistant, ayant déjà disparu, et la conscience engagée dans l'observation semble avoir perdu le contact avec l'objet qui est noté. C'est pour cette raison qu'un méditant peut penser ici : « J'ai perdu la connaissance intuitive », mais il ne devrait pas penser ainsi.

 

Car autrefois sa conscience se délectait normalement d'objets conceptuels, de formes, etc… et même jusqu'à la connaissance de l'apparition et de la disparition, l'idée de formations avec leurs traits spécifiques lui était toujours apparente. Son esprit se délectait donc d'un objet clairement distinct constitué de formations, avec sa structure particulière et ses caractéristiques particulières.

 

Mais maintenant que ses connaissances se sont développées de la manière décrite ci-dessus, aucune idée des caractéristiques ou de la structure des formations ne lui apparaît, encore moins d’autres concepts plus grossiers. À un tel stade, l'apparition des formations, c'est-à-dire la première phase du processus, n'est pas apparente (comme c'est le cas dans le cas de la connaissance de l'apparition et de la disparition), mais seule la dissolution est apparente, c'est-à-dire la phase finale, ayant la nature de la disparition. Par conséquent, l'esprit du méditant ne s'en réjouit pas au début, mais il peut être sûr que bientôt, après s'être familiarisé avec cette étape de la pratique, son esprit se délectera également de la cessation (des phénomènes), qui est appelée la dissolution. Avec cette assurance, il devrait à nouveau se tourner vers la pratique de l'observation continue.

 

Lorsqu'il est ainsi engagé, il perçoit que dans chaque acte de noter, il y a toujours deux facteurs présents : un facteur objectif et un facteur subjectif : l'objet noté et l'état mental de le connaître qui se dissolvent et disparaissent par paires, une paire après l'autre. Car dans chaque exemple d'un mouvement ascendant de l'abdomen, il y a, en fait, de nombreux processus physiques constituant le mouvement ascendant, que l'on voit se dissoudre en série. C'est comme voir la disparition successive et continue d'un mirage d'été instant après instant, ou c'est comme l'éclatement rapide et continu des bulles produites dans une forte averse par d'épaisses gouttes de pluie tombant sur une surface d'eau, ou comme l'extinction rapide et successive de lampes à huile ou de bougies, soufflées par le vent.

 

C’est de cette façon qu’apparaît la dissolution et la disparition, moment par moment, des processus corporels notés. Et la dissolution de la conscience remarquant ces processus corporels lui est apparente avec la dissolution des processus corporels. De plus, tandis qu'il note d'autres processus corporels et mentaux, leur dissolution, aussi, lui sera apparente de la même manière. Par conséquent, la connaissance lui viendra que quelle que soit la partie du corps qu'il note cet objet cesse d'abord et après cela la conscience engagée à noter cet objet suit dans son sillage.

 

À partir de là, le méditant comprendra très clairement dans le cas de « chaque paire » successive la dissolution de n'importe quel objet et la dissolution de la conscience remarquant cet objet même.

Il convient de garder à l'esprit que cela se réfère exclusivement à la compréhension obtenue uniquement par l'expérience directe par une personne engagée dans la pratique de l’observation des phénomènes physiques et mentaux, ce n'est pas une opinion dérivée d'un simple raisonnement.

 

C'est la compréhension parfaitement claire de la dissolution des deux choses, paire par paire, c'est-à-dire : 1 : de l'objet visuel ou autre apparaissant à l'une des six portes sensorielles, et : 2 : de la conscience remarquant cet objet même qui est appelée "connaissance de la dissolution."

 

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6. Connaissance de la peur

 

Lorsque cette connaissance de la dissolution sera mature, en voyant simplement la dissolution de toutes les formations, surgiront progressivement la connaissance de la peur et d'autres connaissances supérieures, ainsi que leurs aspects respectifs de la peur, etc...

 

Ayant vu comment la dissolution de deux choses, c'est-à-dire de tout objet noté et de la conscience perspicace qui le note, a lieu moment par moment, le méditant comprend également par inférence que dans le passé aussi, toute chose conditionnée (formation) s'est désagrégée de la même manière, qu'ainsi elle se désagrègera aussi à l'avenir, et qu'à présent elle se désagrège aussi. Et juste au moment où il notera toutes les formations qui sont évidentes, ces formations lui apparaîtront sous leur aspect de peur. Par conséquent, pendant l'acte même de noter, le méditant en viendra également à comprendre : "Ces formations sont en effet effrayantes."

 

Une telle compréhension de leur caractère effrayant est appelée "la connaissance de la conscience de la peur", elle porte aussi le nom de "connaissance de la peur". À ce moment-là, l’esprit du méditant est saisi par la peur et semble impuissant.

 

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7. Connaissance de l’aspect insatisfaisant de toute chose

 

Lorsque le méditant a réalisé la peur (des formations) à travers la connaissance de la peur, et qu'il continue à noter continuellement, alors la « connaissance de l’aspect insatisfaisant de toute chose » surgira en lui d'ici peu. Lorsque cette connaissance apparaît, toutes les formations, que ce soit parmi les objets notés, ou parmi les états de conscience engagés dans l'observation, apparaîtront insipides, pénibles, et insatisfaisants. Alors il ne voit, à ce moment-là, que de la souffrance, que de l'insatisfaction, que de la misère. C'est pourquoi cet état est appelé « connaissance de l’aspect insatisfaisant de toute chose ».

 

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8. Connaissance du dégoût

 

Voyant ainsi l’aspect insatisfaisant de toutes choses (formations) conditionnées, l’esprit du méditant ne trouve aucun plaisir à ces choses misérables mais en est totalement dégoûté. Parfois, son esprit devient mécontent et apathique. Malgré tout, il n'abandonne pas la pratique de la connaissance intuitive, mais consacre tout son temps à s'y engager continuellement. Il doit donc savoir que cet état d'esprit n'est pas l'insatisfaction de la méditation, mais est précisément la "connaissance du dégoût" qui se manifeste par le fait d'être dégoûté des formations. Même s’il se met à penser à l’existence la plus heureuse possible, ou aux objets les plus agréables et les plus désirables, son esprit ne s'en délectera pas, n'y trouvera aucune satisfaction. Au contraire, son esprit tendra uniquement vers Nibbana. Par conséquent, pendant qu’il pratique, la pensée suivante surgira en lui : "La cessation de toutes les formations qui se dissolvent d'instant en instant c’est seulement cela le bonheur."

 

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9. Connaissance du désir de délivrance

 

Lorsque, du fait de cette connaissance maintenant acquise, le méditant éprouve du dégoût à l'égard de toute formation notée, naîtra en lui le désir d'abandonner ces formations ou de s'en délivrer. La connaissance relative à ce désir est appelée « connaissance du désir de délivrance ». À ce moment-là, diverses sensations douloureuses surviennent généralement dans le corps, ainsi qu'une réticence à rester longtemps dans une même posture. Même si ces états ne surviennent pas, la nature inconfortable des formations deviendra plus évidente que jamais. Et à cause de cela, pendant qu’il pratique, il ressent le désir de s’en libérer et les pensées suivantes surgissent en lui : "Oh, puis-je bientôt me libérer de cela ! Oh, puis-je atteindre l'état où ces formations cessent ! Oh, puis-je être capable d'abandonner ces formations complètement !" À ce stade, sa conscience notant mentalement semble reculer devant chaque objet noté et souhaite s'en échapper.

 

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10. Connaissance de la ré-observation

 

Étant ainsi désireux de se libérer des formations, le méditant fait un effort plus fort et continue la pratique de noter ces formations dans le seul but de les abandonner et de s'en échapper. Pour cette raison, la connaissance qui apparaît à ce moment-là est appelée « connaissance de la ré-observation ». Le terme "ré-observation" a la même signification que "re-contemplation". Alors la nature (ou les caractéristiques) des formations : leur caractère impermanent, souffrance et sans soi, lui sera clairement évidente, et parmi ces trois aspects, l'aspect de la souffrance sera particulièrement distinct.

 

À ce stade aussi, apparaîtront généralement diverses douleurs sévères, aiguës et d'intensité croissante. Dès lors, tout son corps et son esprit lui apparaîtront comme une masse insupportable de maladie ou un conglomérat de souffrance. Et généralement un état d'agitation se manifestera, le rendant incapable de maintenir la position assise au-delà d’une certaine durée. Le méditant ne sera en effet pas capable de maintenir une position longtemps, mais voudra souvent en changer. Cet état, cependant, manifeste simplement le caractère insupportable des formations. Bien qu'il veuille changer sa position, le méditant ne devrait pas céder facilement à ce souhait, mais devrait s'efforcer de rester immobile pendant une période plus longue dans la même posture et continuer à méditer. Ce faisant, il pourra surmonter son agitation.

 

À ce stade, sa connaissance liée à la vision pénétrante est très forte et lucide, et grâce à elle, même ses sensations les plus douloureuses cesseront immédiatement dès qu'elles seront fermement notées.

 

Même si une sensation douloureuse ne cesse pas complètement, il percevra qu'elle se dissout, partie par partie, d'instant en instant. C'est-à-dire que la cessation, l’extinction et la disparition de « chaque unique instant de sensation » deviendront apparentes séparément dans chaque acte de noter. En d'autres termes, cela ne sera plus comme c’était à l'époque de la « connaissance par compréhension », où le flux constant, la continuité des sensations de même nature apparaissait comme une seule unité. Mais si, sans abandonner la pratique, cette sensation douloureuse est fermement et continuellement notée, elle cessera entièrement rapidement. Lorsque cette sensation douloureuse cesse de cette manière, elle cesse définitivement et ne se reproduit plus.

 

Bien qu’à ce stade, sa connaissance liée à la vision pénétrante soit devenue forte et parfaitement lucide, le méditant n'en est pas pour autant satisfait. Il pensera même : "Ma connaissance intuitive n'est pas claire." Il devrait, cependant, écarter de telles pensées en les notant minutieusement, et il devrait continuer sa tâche de noter continuellement les formations corporelles et mentales au fur et à mesure qu'elles se produisent.

 

S'il persévère ainsi, sa perception deviendra vite de plus en plus claire. Ensuite, le méditant surmontera les sensations douloureuses et l'agitation le rendant incapable de rester longtemps assis dans la même position, ainsi que l'idée que sa connaissance intuitive n'est pas encore assez claire. Sa perception fonctionnera alors rapidement et, à chaque instant de note mentale, il comprendra très clairement l'une des trois caractéristiques : l'impermanence, etc...

 

Cette compréhension de l'une des trois caractéristiques par l'acte de noter qui fonctionne en succession rapide, est appelée « connaissance forte de la ré-observation ».

 

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11. Connaissance de l'équanimité vis-à-vis des formations

 

Lorsque cette connaissance de la ré-observation sera mûre, apparaîtra la connaissance percevant naturellement et spontanément les processus corporels et mentaux comme évidents et en succession continue. C'est ce qu'on appelle "la connaissance de l'équanimité vis-à-vis des formations".

 

À ce stade, dans l'acte de noter, aucun effort n'est plus nécessaire pour maintenir l’observation des formations et la compréhension de leur nature. Lors de chaque acte de noter, l'objet à noter et la note apparaîtront simultanément et spontanément d’eux-mêmes et la connaissance intuitive comprendra la nature de l’objet automatiquement. C'est comme si aucun nouvel effort n'avait besoin d'être fait par le méditant.

 

Autrefois, en voyant la dissolution des formations, surgissaient successivement l'aspect effrayant, l’aspect insatisfaisant de toute chose, l'aspect du dégoût, le désir de délivrance et l'insatisfaction à l'égard des connaissances acquises jusqu'ici. Mais maintenant ces états mentaux ne surviennent plus même si, au stade actuel, le méditant perçoit de près l'éclatement des formations qui se dissolvent encore plus rapidement.

 

Même si une sensation douloureuse surgit dans le corps, aucune perturbation mentale (peine) ne surgit et il n'y a pas de manque de détermination pour la supporter. En fait, généralement à ce stade, les douleurs seront totalement absentes, c'est-à-dire qu'elles ne surviennent pas du tout.

 

Même si le méditant pense à quelque chose d'effrayant ou de triste, aucun trouble mental n'apparaîtra, que ce soit sous forme de peur ou de chagrin. Ceci, est "l'abandon de la peur" au stade de "l'équanimité vis-à-vis des formations".

 

Au stade antérieur, en atteignant la connaissance de l'apparition et de la disparition, une grande joie s'était manifestée du fait de la clarté de la connaissance intuitive. Mais maintenant, ce genre de joie ne surgit pas, bien qu'il y ait cette clarté d'esprit extrêmement paisible et sublime qui appartient à "l'équanimité vis-à-vis des formations". Bien que le méditant voit réellement des objets désirables propices à la joie ou, bien qu'il pense à diverses choses agréables, aucune sensation forte de joie n'émergera. C'est "l'abandon du plaisir" au stade de "l'équanimité vis-à-vis des formations".

 

Le méditant ne nourrit aucun désir, ni aucune haine à l'égard d'aucun objet désirable ou indésirable qui se présente à l’une des portes sensorielles, mais comprenant instantanément leur véritable nature, il les prend comme identiques les unes ou les autres dans son observation. C’est une pure compréhension intuitive instantanée sans passer par la réflexion. Il réalise alors la "vision impartiale " au stade de "l'équanimité vis-à-vis des formations".

 

De ces trois qualités que nous venons de mentionner, il est dit dans le Chemin de Purification : « Ayant écarté la peur et la joie, il est impartial et neutre envers toutes les formations » (Visuddhimagga, xxi,62).

 

S'il reprend la pratique avec la pensée : "Maintenant, je vais reprendre ma pratique vigoureusement!" alors, très vite, son observation fonctionnera efficacement et automatiquement. À partir de là, le méditant n'a plus besoin de faire d'efforts supplémentaires délibérés. Bien qu'il ne fasse pas d'effort délibéré, sa pratique se poursuivra dans un flux continu et régulier pendant une longue période, elle durera même deux ou trois heures sans interruption. C'est "l'état de pratique de longue durée" de l'équanimité vis-à-vis des formations.

 

Se référant à cela, il est dit dans le Patisambhidamagga : « "La sagesse qui dure longtemps est la connaissance présente dans les états mentaux d'équanimité vis-à-vis des formations. » Le grand Commentaire du Chemin de Purification explique ainsi : "Ceci est dit en référence à la connaissance fonctionnant dans un flux continu."

 

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12. La connaissance intuitive menant à l'émergence

 

Ainsi, grâce à la connaissance de l'équanimité vis-à-vis des formations, qui est dotée de nombreuses vertus, bénédictions et pouvoirs, le méditant note les formations au fur et à mesure qu'elles se produisent. Lorsque cette connaissance est mûre, devenue vive, forte et lucide, en atteignant son point culminant, il comprendra n'importe laquelle des formations comme étant impermanente ou douloureuse ou sans soi, rien qu'en voyant leur dissolution.

 

À ce stade la capacité d’observation de l’une des trois caractéristiques, qui est encore plus lucide dans sa parfaite compréhension de la nature de toutes les formations, se manifeste deux ou trois fois ou plus en succession rapide. C'est ce qu'on appelle "la connaissance intuitive menant à l'émergence."

 

Alors, immédiatement après le dernier moment de conscience dans la série d'observation dans le cadre de cette connaissance intuitive menant à l'émergence, la conscience du méditant « bondit » dans Nibbana, qui est la cessation de toutes les formations, en le prenant comme objet. Alors lui apparaît l'apaisement (l'extinction) de toutes les formations appelé cessation.

 

Ce mode de réalisation de Nibbana a été mentionné dans de nombreux discours du Bouddha, par exemple : « La vision de la vérité est apparue : tout ce qui a la nature d'apparaître doit nécessairement cesser. Ici, les mots « doit nécessairement cesser » indiquent l'aspect de la réalisation de l'apaisement et de la cessation de toutes les formations qui ont la nature d'apparaître.

 

De même, dans les Questions du roi Milinda au Bouddha, il est dit : "Sa conscience, tout en poursuivant la pratique d’observer, dépasse l'apparition continue (occurrence continue) des phénomènes et se pose sur la non-apparition (non-occurrence). Celui qui, ayant pratiqué de la manière correcte, s'est posé sur la non-apparition, ô roi, on dit qu'il a réalisé Nibbana."

 

Ce qui signifie que le méditant qui souhaite réaliser Nibbana doit se rappeler de porter à la conscience inlassablement par la pratique de l'observation, chaque processus corporel et mental qui apparaît à l'une des six portes des sens. Quand il procède ainsi, sa conscience engagée dans l'observation prendra à chaque instant pour objet, jusqu'à ce que la connaissance d'adaptation soit atteinte, les formations corporelles et mentales (conditionnées) appelées ici "occurrence continue" parce qu'elles continuent à se produire encore et encore dans un flux ininterrompu, comme le courant d'une rivière.

 

Mais dans la dernière phase, au lieu de prendre pour objet cette occurrence continue, la conscience va au-delà, la dépasse et se pose sur la « non-occurrence », qui est le contraire des formations corporelles et mentales appelées ici « occurrence ».

 

En d'autres termes, le méditant arrive à la non-occurrence, c'est-à-dire qu'il atteint la cessation qui est l'apaisement des formations (ou phénomènes conditionnés).

 

Lorsque le méditant, ayant déjà pratiqué correctement, et sans écart, au moyen de la connaissance de l'apparition et de la disparition et des autres connaissances (et au moyen de la purification de la conduite, de l'esprit, de la vue, etc.), est ainsi arrivé à la non-occurrence (par la conscience qui la prend pour objet), on dit qu'il a "réalisé Nibbana".

 

Il est celui qui a fait de Nibbana une expérience directe et l'a réellement vu.

 

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13. Connaissance de l'adaptation

 

Ici, la connaissance au moyen de l’observation qui apparaît en tout dernier dans la série constituant la connaissance intuitive menant à l'émergence est appelée « connaissance de l'adaptation ».

 

C'est la fin de la purification par la connaissance et la vision du cours de la pratique.

 

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14. Connaissance de la maturité

 

Immédiatement après, un type de connaissance se manifeste qui, pour ainsi dire, prend pour objet pour la première fois Nibbana, qui est vide de formations (phénomènes conditionnés) puisqu'il est cessation. Ces connaissances sont appelées "connaissances de maturité".

 

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VII. Purification par la Connaissance et la Vision

 

15. Connaissance du chemin

 

Elle est suivie immédiatement par la connaissance qui demeure dans ce même Nibbana, qui est dépourvu de formations puisqu'il est cessation. C'est ce qu'on appelle « la connaissance de la voie ».

 

C'est aussi ce qu'on appelle « la purification par la connaissance et la vision ».

 

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16. Connaissance de la fructification

 

Cela est à nouveau immédiatement suivi par la connaissance qui appartient au stade final et se poursuit dans le cours de la connaissance qui l’a précédée. Elle demeure dans ce même Nibbana, qui est vide de formations puisqu'il est cessation.

 

C'est ce qu'on appelle la "connaissance de la réalisation".

 

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17. Connaissance de la révision

 

La durée de cette triple connaissance de la maturité, du chemin et de la réalisation n'est toutefois pas longue du tout. Elle est très courte et ne dure qu'un instant, comme la durée d'un seul moment de conscience d’observation.

 

Ensuite apparaît la « connaissance de la révision ». Grâce à cette connaissance de la révision, le méditant discerne que la connaissance intuitive menant à l'émergence s'est accompagnée de la fonction très rapide de noter et qu'immédiatement après la dernière phase de noter la conscience de la voie est entrée dans la cessation (des formations). Il s'agit de "la connaissance de la révision du chemin".

 

Il discerne également que la conscience demeurait dans ce même état de cessation pendant la période intermédiaire entre « la voie » et « la révision ». Il s'agit de « la connaissance de la révision du fruit ».

 

Il discerne en outre que l'objet qui vient d'être expérimenté est vide de toute formation. C'est "la connaissance de la révision de Nibbana."

 

À cet égard, il est dit dans le Chemin de la Purification : « 'Par ce chemin, en effet, je suis venu », ainsi il passe en revue le chemin. « Cette bénédiction a été obtenue », ainsi il passe en revue la réalisation. « Cet état a été pénétré comme un objet par ma conscience », ainsi il passe en revue l'Immortel, Nibbana (Visuddhimagga, xxii, 20).

 

Certains méditants, mais pas tous, ont la "révision des souillures."

Après avoir passé en revue de cette manière, le méditant continue toujours la pratique de noter les processus corporels et mentaux à mesure qu'ils deviennent évidents. Mais tandis qu'il est ainsi engagé dans l'observation, les processus corporels et mentaux lui apparaissent tout à fait grossiers et non plus subtils comme ils l’étaient au moment de la connaissance de l'équanimité vis-à-vis des formations.

 

Il en est ainsi parce que la connaissance maintenant présente a la nature de la connaissance de l'apparition et de la disparition. Car lorsque les nobles disciples (c'est-à-dire les entrants dans le courant, etc.) reprennent la pratique de la connaissance intuitive en notant, la connaissance de l'apparition et de la disparition apparaît généralement au début. C'est le cours habituel des choses à cet égard.

 

Cependant, lorsque certains méditants émergent de la réalisation de la voie et du fruit, une grande foi, bonheur, ravissement et tranquillité, produits en vertu de la réalisation, surgissent et les inondent. À cause de cela, ils sont incapables de réaliser la pratique de noter quoi que ce soit d'apparent à ce moment-là. Même s'ils font un double effort et tentent de poursuivre la pratique de la connaissance intuitive, ils échouent à discerner les phénomènes clairement et séparément, au moment où ils se produisent. Ils continuent à n'éprouver que le ravissement, la tranquillité et le bonheur, qui se produisent avec une grande force.

 

Cet état d'esprit, extraordinairement serein par la forte foi qui y règne, dure une heure, deux heures ou plus, sans interruption. Pour cette raison, les méditants se sentent comme s'ils se trouvaient dans un endroit tel qu'un grand espace ouvert baigné de rayonnements des plus délicieux. Le ravissement et le bonheur, d'un caractère serein, qui surgissent alors sont exprimés par les méditants ainsi : « Je n'ai jamais ressenti et expérimenté un tel bonheur ! » Au bout de deux ou trois heures, cette foi, ce bonheur, ce ravissement et cette tranquillité s'estomperont. Les méditants peuvent à nouveau procéder à l'observation des processus corporels et mentaux au fur et à mesure qu'ils se produisent, en les distinguant séparément, et ils seront capables de les discerner clairement. Mais à ce moment-là aussi, d'abord la connaissance de l'apparition et de la disparition apparaîtra.

 

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18. Obtention de la réalisation (fructification)

 

Tandis que le méditant est ainsi engagé dans l'observation, sa connaissance perspicace grandit progressivement et atteint rapidement à nouveau le stade de l'équanimité vis-à-vis des formations. Si son pouvoir de concentration est encore en deçà de la perfection, seule l'équanimité sur les formations continue de se répéter. Mais si sa concentration a atteint la perfection, alors, dans le cas de celui qui pratique la connaissance intuitive dans le but d'atteindre uniquement la première voie et la réalisation, la conscience de réalisation de la première voie seule, atteint la cessation des formations au moyen de l'atteinte de la fructification.

 

Cela se produit exactement de la même manière que la conscience de la voie et de la fructification qui s'est produite plus tôt dans la séquence de conscience appartenant à l'atteinte initiale de la première voie. La seule différence ici est la capacité de la réalisation à durer longtemps.

 

Le méditant devrait prendre la résolution d’être capable de répéter la réalisation de l'accomplissement de la fructification, l'atteindre rapidement et, au moment de la réalisation, y demeurer longtemps, pendant dix, quinze ou trente minutes, ou pendant une heure ou plus.

 

Chez celui qui s'applique à atteindre la fructification, la connaissance de l'apparition et de la disparition apparaîtra au début. En avançant à partir de là dans la séquence voulue, la connaissance de l'équanimité concernant les formations sera atteinte rapidement.

 

En fait, lorsque l'habileté dans la pratique a été acquise, la connaissance de l'équanimité au sujet des formations apparaîtra rapidement même après quatre ou cinq actes d'observation. Si le pouvoir de concentration a atteint la perfection, la conscience de la fructification sera à plusieurs reprises absorbée dans la cessation par le biais de la réalisation de la fructification. L'esprit peut ainsi atteindre l'absorption même pendant que l'on marche, ou pendant qu'on prend un repas, et l'atteinte de la fructification peut rester pendant n'importe quelle durée déterminée. Pendant la réalisation, l'esprit ne demeurera que dans la cessation des formations et ne sera conscient de rien d'autre.

 

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19. Les voies supérieures et les fruits

 

Lorsque le méditant est ainsi devenu habile à atteindre la réalisation du fruit, il doit résolument fixer son esprit sur la tâche d'atteindre les voies et les réalisations supérieures. Et pour cela, comme auparavant, il devrait effectuer la pratique de noter tout ce qui se passe aux portes des six sens.

 

Par conséquent, le méditant doit noter tout processus corporel et mental qui lui devient évident aux portes des six sens. Pendant qu'il est ainsi engagé à noter, il verra, au stade de la connaissance de l'apparition et de la disparition, que les premiers objets constitués de formations lui paraissent plutôt grossiers, et que son esprit n'est pas bien concentré. Le développement de la connaissance intuitive appartenant aux voies supérieures n'est, en fait, pas aussi facile que celui de la connaissance intuitive appartenant à la réalisation déjà atteinte par le méditant. C'est même quelque peu difficile, en raison du fait que la connaissance intuitive doit être développée à nouveau. Ce n'est cependant pas aussi difficile qu'au début de la pratique. En une seule journée, ou même en une seule heure, il peut acquérir la connaissance de l'équanimité sur les formations. Cette affirmation est faite ici, en se basant sur l'expérience habituellement acquise par des méditants contemporains qui ont été guidés dès le départ et qui ne possèdent pas une intelligence exceptionnelle.

 

Mais bien que l'équanimité sur les formations soit atteinte, si les facultés spirituelles n'ont pas encore atteint leur pleine maturité, cela ne fait que se répéter. Bien que celui qui a gagné l'un des fruits inférieurs puisse y entrer plusieurs fois en une heure, si ses facultés spirituelles sont immatures, il ne peut pas atteindre le chemin supérieur suivant en un, deux, trois ou plusieurs jours. Il demeure simplement dans l'équanimité au sujet des formations. Par contre, s’il dirige son esprit pour atteindre la réalisation déjà atteinte, il l'atteindra peut-être en deux ou trois minutes.

 

Lorsque les facultés spirituelles sont matures, celui qui pratique la connaissance intuitive pour atteindre un chemin supérieur constatera qu'immédiatement après que l'équanimité concernant les formations a atteint son point culminant, le chemin supérieur et la réalisation surgissent de la même manière qu'auparavant (c'est-à-dire comme au moment du premier chemin et de la réalisation), c'est-à-dire qu'il est précédé des étapes d'adaptation et de maturité. Après la réalisation, les étapes de révision, etc… qui suivent sont également les mêmes qu'avant.

 

De même, la méthode de la pratique de la connaissance intuitive et les progrès de la connaissance jusqu'à l'état d'Arahant se déroulent précisément de la même manière que celle décrite. Il n'est donc pas nécessaire de la développer davantage.

 

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Conclusion

 

Ce texte sur les « progrès de la connaissance intuitive à travers les étapes de la purification » a été écrit sous une forme concise afin que les méditants puissent facilement le comprendre. Les détails complets n'ont donc pas été donnés ici. Et comme il a été écrit dans le but de le rendre facilement compréhensible, dans de nombreux passages, les références canoniques pertinentes n'ont pas été citées.

 

Bien qu'au début il ait été mentionné que ce texte a été écrit pour ceux qui ont déjà obtenu des résultats distinctifs dans leur pratique, d'autres peuvent peut-être aussi le lire avec profit.

 

Voici maintenant mes derniers vœux pour ce dernier type de lecteurs : tout comme un repas délicieux et nutritif ne peut être pleinement apprécié que par celui qui l'a lui-même mangé, de la même manière, toute la série de connaissances décrites ici ne peut être pleinement comprise que par celui qui l'a lui-même vue par expérience directe, et non autrement.

 

Que toutes les bonnes personnes atteignent ainsi le stade de compréhensions de toute cette série de connaissances ! Puissent-elles aussi s'efforcer de l'atteindre !